Corrigé des questions du brevet de français 2016
Texte de Maurice Genevoix, « La Boue », Ceux de 14, 1916.
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1. Présentez précisément la situation du narrateur.
Le narrateur est un soldat de la première guerre mondiale. Il se nomme Maurice Genevoix. Il s’agit
d’un extrait d’autobiographie comme l’indiquent le paratexte et l’utilisation de la première personne : « Maurice Genevoix raconte à la première personne son expérience de soldat de la première guerre mondiale ».
Maurice Genevoix se trouve dans une « tranchée pleine d’hommes », « la nuit » (l. 3) sous les
intempéries confronté au froid, la solitude et la peur de la mort ayant pour seul réconfort, la poésie.
2. a) Qu’est ce qui attire l’attention du narrateur ? Pour quelles raisons ?
L’attention du narrateur est retenue par la pluie tout particulièrement par « les petits claquements vifs » émis par « les gouttes d’eau » qui « tombent, régulières » (l. 4). Le narrateur s’ennuie ; « c’est très long » (l. 1). « On ne voit même pas la fumée de sa pipe » (l. 1), et le silence règne ; « quand la tranchée pleine d’hommes s’enfonce dans la nuit, et se tait » (l. 3) hormis « les gouttes d’eau qui tombent » (l. 4)
2 b) Comment le texte crée-t-il un effet d’obsession ? Justifiez votre réponse en vous appuyant sur l’ensemble de la page.
Le texte crée un effet d’obsession par l’omniprésence du thème de l’eau et du jeu de répétition.
Dans un premier temps, le bruit de la pluie est une distraction, le soldat compte « Une… deux… trois… quatre… cinq…Je les compte jusqu’à mille. » (l. 5-6), puis simule des calculs « mille gouttes d’eau en dix minutes… » (l. 7-8).
La chute de l’eau qui tombe crée un rythme : « les gouttes d’eau tombent, régulières » (l. 4) puis « Plus vite : deux gouttes d’eau par seconde » (l. 6-7). Ce rythme est accentué par les réptitions des termes « gouttes d’eau qui tombent » disséminées dans l’extrait. Elles miment « les petits claquements vifs » (l. 4) et font écho à celles que l’on retrouve dans un poème, sujet du second paragraphe.
La pluie est comme un refrain entêtant, « une antienne » dont on ne parvient pas à se défaire. Ce « goutte à goutte » devient pesant voire douloureux pour le soldat « couché » dont « les gouttesrégulières qui tombent à la même place du front, le taraudent et l’ébranlent » (l .13-14) mais aussi pour Maurice Genevoix qui est transis par le froid et l’humidité ; « les gouttes […] mêlées à la boue enveloppent ainsi mes jambes, montent vers mes genoux et me glacent jusqu’au ventre » (l. 17-19). La personnification de l’eau souligne le fait que l’eau est la seule présence palpable dans cette tranchée.
3. Quelles sont les actions tentées par le narrateur pour s’opposer à cette obsession ? (lignes 5 à 27)
Le narrateur dans un premier temps compte les gouttes, puis simule des calculs. Puis, pour échapper à la réalité, à la folie, à la mort, il a recours à l’univers poétique, il convoque « Victor Hugo; et puis Baudelaire ; et puis Verlaine ; et puis Samain… ». Il se remémore quelques « vers » de poésie « qu’on n’a pas oubliés. » (l. 9) qu’il récite « en remuant à peine les lèvres » (l. 9) restitués aux vers 20-25 : « Le bois était triste aussi, /Et du feuillage obscurci, /Goutte à goutte, /La tristesse de la nuit /Dans nos cœurs noyés d’ennui /Tombait toute… » ou aux vers 29-31 « La planche était triste aussi /Et de son bois obscurci, /Goutte à goutte… »
4. « Dégouttelantes » (ligne 11) : comment ce mot est-il construit ? Quel sens lui donnez-vous ?
Ce mot se contruit par dérivation en ajoutant le préfixe « dé », et « gouttelante » mais il peut être accpeter aussi l’ajout du suffixe au radical « goutte ».
Ce mot suggère que l’eau s’infiltre dans les deux planches, que le goutte à goutte se transforme en un ruissellement.
5. Comment ressentez-vous l’écoulement du temps dans ce texte ? Quels indices confirment cette impression ?
L’extrait débute avec ce constat « c’est très long », la nuit comme la pluie s’éternisent « depuis des heures » (l. 16). Le temps s’écoule lentement au rythme des gouttes comme le soulignent les points de suspension. Cette lenteur est si pesante qu’elle nécessite une distraction soit en comptant les gouttes soit en « récit[ant] des vers » pour échapper à la folie.
6. Quel est le temps verbal dominant dans le texte ? Quel est l’intérêt de son emploi dans ce récit ?
Le présent de l’indicatif est le temps dominant. L’emploi du présent de narration permet de rendre plus vivant le récit et permet au lecteur de mieux percevoir les expériences de Maurice Genevoix.
7. « Il faut que je me lève, que je marche, que je parle à quelqu’un » (ligne 32). Comment comprenez-vous cette dernière réaction du narrateur ?
Cette dernière réaction du narrateur indique son désir de fuir ce lieu, de quitter son inactivité, de rompre sa solitude pour ne pas basculer dans la folie voire la mort. Effectivement, la présence de la mort est suggérée par l’engourdissement des membres stagnant dans l’eau froide, puis la présence des planches recouvertes de boue évoquant un cercueil.
8. Comment pourrait-on adapter cette scène au cinéma ? Vous décrirez et expliquerez vos choix (mouvements de caméra, cadrages, lumière, son …) en tant que réalisateur ou réalisatrice du film
Cette scène pourrait commencer avec un plan d’ensemble en noir et blanc présentant le cadre ; une vaste étendue baignée dans l’obscurité où se dessinent des tranchées entre deux passages brumeux. Un plan plus resserré dévoilera des masses sombres à peine perceptibles occupant les tranchées. Ces plans ne seront pas accompagnés de musique, cela reproduira le silence mais surtout traduira l’atmosphère oppressante et inquiétante que doivent endurer les soldats.
Ensuite, un gros plan présentera Maurice Genevoix recroquevillé dans une tranchée sous quelques planches, fumant sa pipe. Le spectateur découvrira une pluie fine puis, l’eau ruisselant dans la tranchée, puis les gouttes glissant le long du casque, des habits du soldat. Une musique classique aux tonalités graves sera diffusée en arrière fond, toutefois le martèlement de l’eau sera toujours audible.
Le plan suivant s’attardera sur le goutte à goutte de l’eau et le bruit du clapotis sera amplifié. On découvrira le personnage en train de compter puis ensuite son visage qui se crispe avec un très gros plan sur son visage. Le son s’intensifira pour suggérer le caractère obsédant de ce son. Puis une succession de gros sur le soldat puis sur l’écoulement de l’eau pour reproduire la tentative vaine de Maurice Genevoix cherchant à échapper à cet enfer. Le dernier plan pointera la montée de l’eau à l’intérieur de la tranchée. Ceci n’est qu’un exemple mais d’autres possibilités sont envisageables.
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